L’homme au tablier

Aimé Agnel

Pour John Ford, comme pour les anciens Grecs, la réalité est double. Il s’agit moins, comme il est souvent dit, d’une ambiguïté qui lui serait propre que d’une vision complexe (non unifiée, non simplifiée) des êtres et du monde. La polarité contraire qui souvent nous dérange et que nous dévalorisons, rejetons, refoulons. Ford en tient compte. Elle l’interesse. Il accepte donc et favorise sa mise en tension avec la valeur reconnue, convenue, allant de soi.

L’avocat Ransom Stoddard (James Stewart, dans L’Homme qui tua Liberty Valance) figure cette complexité fordienne. Le tablier qu’il porte, qui fait de lui une « servante », symbolise les valeurs paradoxales pour lesquelles il combat. Mais son courage n’est plus celui du cow-boy Tom Doniphon (John Wayne). Ce n’est pas un dépassement viril de la peur, ni la jouissance d’une rivalité bien tenue : c’est un courage éthique qui peut aller jusqu’au sacrifice et qui trouve son fondement dans la part la plus féminine et la plus obscure de son être.
Le jeu des contraires dans les films de Ford (Nouvelle édition)
Nouvelle édition revue et augmentée

Éditions : La part commune

Collection «L’étranger familier»

176 pages

Format : 14 cm x 19 cm

Prix : 15 €

Parution avril 2006

ISBN : 2-84418-032-9

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